Faut-il avoir peur du corbeau ?
Le corbeau : porteur de mauvais présage. Faut-il en avoir peur ? cet animal intelligent fut autrefois le messager des dieux ; et aujourd’hui ?
Mal-aimé à cause de son croassement sinistre et de sa couleur noire, voir un corbeau fut longtemps considéré un mauvais présage. Avions-nous raison ou faut-il que cela change ?
Le corbeau est traditionnellement considéré comme un animal mantique, c’est-à-dire en lien avec la divination et la voyance. Ce statut tout particulier, qui renforce encore son aura de mystère, sans doute le doit-il au fait d’avoir accompagné Apollon, avec le cygne et l’épervier. En tant que messager du dieu grec, le corbeau a pour mission de délivrer des prophéties à l’homme.
C’est par l’écoute de ses croassements et par l’observation de son comportement qu’on relevait des présages, et cela s’appelle la coracomancie.
Coracomancie : prédire l’avenir avec les corbeaux
Parmi ceux qui voyaient dans le corbeau un porteur de présages et s’en servaient en voyance, les Grecs parvenaient à distinguer jusqu’à 64 sons différents dans le cri de l’animal, chacun possédant un sens précis. On peut, à ce stade, véritablement parler d’un langage.
L’intelligence du corbeau dépasse celle d’un grand nombre de mammifères.
Selon les études scientifiques, elle serait équivalente à celle d’un enfant de deux à cinq ans, ce qui est remarquable et permet effectivement l’ébauche d’un langage parlé. Ils sont capables de communiquer par signes et ont un intérêt pour le jeu — c’est-à-dire des activités sans nécessite de sustentation ou de reproduction. Ce sont également des imitateurs, comme le perroquet. Et enfin, ils sont capables d’empathie !
Pourquoi le corbeau est-il symbole de mauvais présage ?
Malgré cette qualité exceptionnelle d’intelligence, le corbeau est longtemps resté perçu comme un animal signe de malheur, et ce pour une raison simple : c’est un charognard qui se nourrit de carcasses en putréfaction. Il est donc lié à la mort et sa présence lors d’événements important peut être présage de funérailles ou de décès prématuré. En nous ramenant à notre finitude, le corbeau nous ramène aussi à nos angoisses les plus tenaces.
Rappelons que la mort est analogue à « la fin » ; il ne s’agit donc pas nécessairement de la mort physique de quelqu’un. Cela peut aussi être la mort d’un projet, d’un accord, d’une union…
Rappelons aussi que, comme tous les animaux et les signes mantiques (de voyance), le corbeau n’est pas systématiquement porteur de présage. Si vous habitez près d’un champ avec des zones forestières et humides, il y a fort à parier que vous en croisiez souvent sans que cela n’ait de signification particulière.
La voyance est en-dehors comme en soi
Lorsque l’Univers veut vous envoyer un signe, et qu’il le fait à travers un animal mantique, il fera en sorte d’attirer votre attention, afin que vous le perceviez à un moment précis en-dehors du commun. Il faudra alors s’en référer à vos sensations. Ressentez-vous de la tiédeur réconfortante ou plutôt un froid glaçant ? Selon ce que vous êtes en train de traverser et selon vos préoccupations du moment, le message porté par cette voyance (cette synchronicité) sera clair.
Et cela n’appartiendra qu’à vous ! Beaucoup craignent le corbeau et ne supportent pas d’entendre son croassement rauque. Mais certains en ont fait leur animal totem : pour ces personnes-là, la vue d’un corbeau aura une signification très différente des autres.
Le corbeau comme symbole alchimique
En alchimie : la putréfaction, ou Œuvre au noir, est la première phase d’initiation alchimique.
L’obscurité qui caractérise cette phase est symbolisée Saturne, par des squelettes… et des corbeaux. Pas très bon pour sa réputation !
Sans compter que la transition entre les phases alchimiques 1 et 2 portent l’appellation allégorique de : « décapitation du corbeau »
Rassurez-vous, il ne s’agit pas de vraiment couper la tête d’un pauvre corvidé. La « tête du corbeau » est en réalité, en termes de sciences Hermétique, la matière au noir dans le temps de la putréfaction. C’et une “Eau” ou liquide nauséabond, résultat de la phase 1 de la séquence alchimique, et symbolisé par le Corbeau ou “Caput Corvi”. Elle est ensuite dissoute et blanchie dans le Matras sous l’effet du Feu des philosophes.
Le corbeau comme animal totem
Nous avons brièvement mentionné quelques paragraphes plus haut que le corbeau pouvait être un animal totem.
Chez les amérindiens, le corbeau est le septième esprit totem de la roue de la vie des chamans. Il correspond au début de l’automne, lorsque les feuilles commencent à tomber. Il est donc toujours dans son rôle annonciateur de la mort, mais perçu comme faisant partie du cycle éternel plutôt que comme une fatalité à fuir.
D’une manière générale, le corbeau est beaucoup mieux considéré dans les autres cultures (notamment en Chine) : où l’on préfère remarquer son intelligence, sa fidélité (les corbeaux sont monogames) et son sens de la famille (phénomène rare dans le règne animal, les jeunes corbeaux peuvent survenir aux besoins des plus vieux).
Conclusion : faut-il avoir peur du corbeau ?
De plus en plus, nous sommes encouragés à voir les choses différemment et à nous fier à nos ressentis. La coracomancie est amenée à évoluer, car il n’est plus question de nourrir des peurs infondées transmises par des croyances héritées.
La peur du corbeau a été beaucoup entretenue à cause de son symbolisme, mais comme nous l’avons vu, le corbeau comporte deux facettes : d’un côté on voit le charognard qui annonce la mort, de l’autre on voit l’animal intelligent, pacifiste et empathique.
C’est donc à nous de prendre conscience que nous avons un contrôle sur nos croyances et nos perceptions. Le corbeau en lui-même est neutre. C’est la façon dont on le regarde et les circonstances dans lesquels on l’aperçoit qui lui donneront sa couleur, ainsi qu’à la voyance qu’il nous prodigue.
« C’est du bonheur, si tu veux, que le corbeau t’annonce », disait Épictète.